Neuromythes : débusquer les faux experts du cerveau et mieux comprendre les neurosciences

neuromythes apprentissages

Vous croyez peut-être à certains neuromythes sans le savoir.

« On n’utilise que 10% de son cerveau »

« On apprend mieux en voyant l’information quand on est visuel »

« Si on ne boit pas suffisamment d’eau, le cerveau rétrécit »

Peut-être que certaines phrases vous ont fait sourire, mais le diable se cache dans les détails comme on dit.

Je vous propose de démystifier quelques neuromythes et de comprendre comment ils s’installent et surtout comment les repérer ou les éviter.

Cet article est un résumé de l’épisode 19 du Podcast Hack Your Soul :

L'histoire de Coline : détresse et combo de croyances erronées

Sonia, enseignante chevronnée, est invitée à un dîner où elle rencontre Coline. Au cours de la soirée, quand Coline apprend le métier de Sonia, elle lui fait part de ses préoccupations. Son fils est en difficulté à l’école. Elle ne le comprend pas et ne sait plus comment aborder le problème. 

Entre détresse et culpabilité, elle confie les hypothèses qu’elle a pu élaborer :

– ll n’est pas visuel donc l’enseignement ne lui correspond pas
– Il n’a pas une intelligence « classique »
– C’est un artiste, il est cerveau droit
– Je ne l’ai pas assez stimulé or tout se joue avant l’entrée à l’école

Décryptage des neuromythes

Un neuromythe, c’est un néologisme qui désigne une fausse croyance sur le cerveau.

Je vous propose ici d’en aborder 4.

La théorie des styles d'apprentissage

« Il n’est pas visuel » fait référence à la théorie des styles d’apprentissage. Selon cette théorie, chaque individu aurait un canal préférentiel pour apprendre.

En réalité, il n’y a aucune preuve scientifique à l’heure actuelle qu’un enseignement qui adapterait sa pédagogie au profil visuel / auditif ou autre serait plus performant.

Et ce que les études montrent, c’est qu’au contraire, une pédagogie efficace est plutôt une pédagogie qui favorise des méthodologies sollicitant tous les sens, donc l’intégration de l’information de manière multisensorielle.

La théorie des intelligences multiples

Gardner a développé dans les années 80 une théorie selon laquelle il existerait 7 (puis il est monté à 10) intelligences différentes, indépendantes les unes des autres. Cela expliquerait que nous pourrions être doué en maths et pas du tout en dessin par exemple.

Le succès de cette théorie a été fulgurant, si bien que dans son sillage est née la théorie de l’intelligence relationnelle, popularisée par Daniel Goleman.

Mais voilà, en 2016, Gardner lui même a reconnu que sa théorie n’était plus à jour d’un point de vue scientifique et préfère parler de « talents ».

Même si cette théorie est séduisante, deux choses sont fondamentalement fausses d’un point de vue scientifique :

– Associer une structure cérébrale ou neuronale à un type d’intelligence

– L’indépendance supposée des intelligences entre elles.

Cerveau gauche vs cerveau droit

Cette théorie du cerveau gauche ou droit avance que si vous êtes un artiste vous utilisez préférentiellement votre hémisphère droit. L’hémisphère droit serait le siège de la créativité, des émotions, de l’imagination.

Or, les résultats de la recherche à l’aide de l’IRM sont implacables, on ne fonctionne pas sur un seul hémisphère ! L’activité d’une région cérébrale est déterminé par la tâche en cours et non par la préférence supposée d’un hémisphère selon la personnalité.

D’un point de vue anatomique les deux hémisphères sont connectés par une autoroute de l’information qu’on appelle le corps calleux.

Et d’un point de vue fonctionnel le fonctionnement des deux hémisphère est synchrone de telle sorte que des régions homologues distribuées à droite et à gauche coopèrent pour réaliser une tâche.

Selon les connaissances actuelles, à de très rares exceptions, la quasi totalité des matrices cérébrales fonctionnelles sont strictement symétriques.

Tout se joue avant 3 ans

Une assertion très culpabilisante pour les parents !

Bien-sûr que les premiers liens sont cruciaux, que le bébé est un être en développement et particulièrement perméable mais tout ne se joue pas avant 3 ans et heureusement !

L’apprentissage se fait tout au long de la vie, il existe certes des périodes sensibles et critiques mais le développement du cerveau est un processus. Toutes les régions cérébrales n’atteignent pas leur maturité en même temps.

Et la neurogénèse, le fait de produire de nouveaux neurones, se poursuit à l’âge adulte, même si c’est en beaucoup moins grandes quantités que pendant l’enfance.

Pourquoi sommes-nous perméables aux neuromythes ?

D'où viennent les neuromythes ?

Le neuromythe vient souvent d’erreurs faites en toute bonne foi. Elles sont multiples et le terrain est glissant, car nous sommes loin de tout connaître sur le fonctionnement cérébral ! Et encore une fois il s’agit de processus complexes.

D'où viennent les neuromythes

Un même concept comme les styles d’apprentissage par exemple, peut être entendu et compris de manières différentes d’un individu à l’autre. Donc cette même théorie peut aboutir à des croyances multiples et erronées.

Chez les enseignants, le neuromythe des styles d’apprentissage est le plus présent. Particulièrement chez les enseignants en formation initiale, 95,4% le pensent vrai !

Et les études n’arrivent pas à dégager un profil qui serait plus susceptible d’avoir ce genre de croyances.

D’autre part, les données actuelles ne peuvent pas conclure avec certitude sur un impact négatif de la croyance dans les neuromythes sur l’efficacité des pratiques pédagogiques.

Changer les croyances dans les neuromythes ?

Un bon niveau d’éducation, un bon niveau de connaissances générales sur le fonctionnement du cerveau n’exclut pas de croire aux neuromythes. Les 2 choses peuvent coexister. Troublant non ?

Les professionnels de l’éducation sont une des populations la plus étudiée par rapport aux neuromythes. Les études montrent qu’il ne suffit pas d’agir sur les croyances dans les neuromythes pour modifier la pratique pédagogique elle-même.

Entendre la détresse parentale

Incompréhension et infobésité

Dans notre exemple, Coline cherche une explication afin d’aider son enfant. Les neuromythes semblent être à première vue une réponse satisfaisante.

Ils ont l’avantage de donner des réponses facilement compréhensibles, et le vernis pseudo-scientifique les rend crédibles.

Mais comment faire la part des choses alors que nous sommes assaillis d’informations de toute part ? 

Sans compter que quand nous sommes en difficulté face à un problème, on a tendance à prendre toutes les solutions qui se présentent à nous, quitte à laisser de côté notre esprit critique. 

Rejet et stigmatisation

Le risque, c’est de s’enfermer dans une explication qui peu à peu va faire identité. Autrement dit, un symptôme-personnalité : ce symptôme est tellement présent et envahissant que la personne ou son entourage finit par se définir exclusivement à partir de lui.

Et dans nos institutions à bout de souffle : éducation, santé etc… Malgré le professionnalisme, l’adaptation et le dévouement des professionnels, le système craque, et ne peux plus gérer ces symptômes de manière aussi résiliente qu’auparavant.

Cela est violent pour les professionnels, mais bien-sûr aussi pour les patients, élèves, et usagers de ces services.

Comment se protéger des neuromythes ?

Comment limiter les neuromythes

Identifier des sources fiables

La première étape pour se protéger des neuromythes est de vérifier les sources d’information, et de les recouper.

Cherchez des articles et des études scientifiques publiés dans des revues fiables, et méfiez-vous des informations provenant de sources non vérifiées ou qui s’auto-proclament « experts ».

Voici quelques sites fiables concernant les neurosciences :

Du côté des auteurs, on peut citer Stanislas Dehaene (nombreux livres et cours au collège de France), Olivier Houdé (livres, conférences, et il dirige même un DU de neuroéducation).

Bien-sûr cette liste est non exhaustive !

 

Encourager l'esprit critique

Développez un esprit critique en questionnant systématiquement les informations que vous recevez. Demandez-vous d’où elles viennent, si elles sont soutenues par des preuves solides et si elles sont corroborées par plusieurs sources indépendantes.

Discutez-en avec votre entourage et confrontez-vous à des questionnements qui sont en dehors de vos croyances habituelles.

Se former continuellement

Les connaissances en neurosciences évoluent constamment.

Se former recouvre plusieurs aspects : lecture de livres, conférences, abonnement à des newsletter…

Mais aussi parcours universitaires ou l’inscription à des cours en ligne.

L’avantage d’internet c’est que nous avons maintenant littéralement la connaissance à portée de clic.

Conclusion : continuer à se poser des questions

Comprendre et déconstruire les neuromythes nous permet de mieux appréhender nos capacités et celles de nos enfants, et de ne pas se laisser piéger par des croyances.

En développant notre esprit critique et en nous appuyant sur des sources fiables, nous pouvons adopter des approches plus efficaces pour l’apprentissage, l’éducation, la psychologie et notre développement personnel.

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